Anecdote : la mémoire
Charlotte me reprochait toujours de ne pas me souvenir de certaines choses importantes à ses yeux. La date de la mort de son père (qu’elle détestait), la date d’anniversaire des chats, etc. C’était l’occasion de me faire encore des reproches et de s’énerver contre moi.
Je vous ai déjà dit que je n’avais pas le droit de prendre sa voiture, sauf pour en faire le plein : à la station la plus proche bien sûr… Elle me donnait alors sa carte bancaire et me laissait le « plaisir » de lui rendre service. Entre 7h20 et 7h30 uniquement ! Je ne retenais jamais le code de sa carte. D’une part je l’utilisais très peu (1 fois par mois), et d’autre part, pas besoin de le retenir par cœur, si je lui demandais juste avant de partir elle me l’aurait indiqué. Après tout ce ne sont que 4 chiffres ! Mais non, elle me faisait toute une histoire parce que je ne retenais pas ce fichu code. Donc, avant de partir lui faire le plein, elle me faisait une scène pendant de nombreuses minutes et de temps en temps, elle partait au travail sans son plein. Lorsque je lui avais fait le plein et déposé la voiture juste devant elle, ça n’allait pas non plus parce qu’elle ne savait pas descendre sa voiture du trottoir…
Quant à elle, elle retenait tout. Elle avait vraiment cette faculté à graver dans sa mémoire toute information captée à un moment donné. C’était aussi indispensable pour garder le contrôle total, tout le temps. Lorsque je voyais un objet sur lequel je portais un peu d’intérêt dans un magasin, elle le retenait et me l’offrait plus tard, même si au final, j’avais juste de la curiosité.
Je me souviens également d’un événement pas si ancien qui s’était très mal terminé : je devais la récupérer à Lille avec sa mère, je l’appelle donc en partant du travail pour savoir où les récupérer. Elle me répond : au même endroit que d’habitude. Mais je ne me souvenais plus de l’endroit précis. Je l’avais déjà récupérée à plusieurs endroits différents, selon ce qu’elle avait prévu de faire. Je lui demande donc des précisions. Mais elle n’a jamais voulu me les communiquer. Plutôt que de réagir logiquement et de lui indiquer que tant qu’elle ne m’aurait pas indiqué l’endroit précis, je ne viendrais pas les chercher, j’ai essayé de trouver par moi-même en tournant autour des endroits connus.
J’ai fini par les trouver, mais lorsque Charlotte est montée en voiture, elle était furieuse comme jamais. Je ne disais rien pour lui signifier que son comportement était vraiment fatiguant, mais aussi par respect pour sa mère qui n’avait pas besoin de nous voir brouillés pour quelque chose d’insignifiant. Regard noir et agressif pendant les quelques minutes de trajet jusque chez sa mère. Lorsque sa mère est descendue de voiture, elle commence à me hurler dessus : « Mais qu’est-ce qu’elle t’a fait ma mère !!! ». Je lui réponds qu’elle ne m’a rien fait et qu’elle aurait pu me dire où je devais les récupérer. A ce moment, elle hurle de plus belle « Mais qu’est-ce qu’elle a fait de mal ma mère ??? ». Sans réfléchir je lui réponds « Elle t’a fait toi ».
J’aurais pu me passer de cette remarque inutile, méchante, débile, mais c’est tout ce qui m’est venu à cet instant devant cette provocation. Elle est alors descendue en furie pour dire à sa mère « Martin vient de dire que c’était moi ce que tu as fait de pire dans ta vie !!! ».
Voilà comment sur la base de rien on monte les gens les uns contre les autres. Sa mère a cru à cette version, et n’a comme à l’habitude, pas cherché à comprendre ce qu’il se passait. Charlotte et moi avons ensuite passé de nombreuses minutes dans la voiture, je voulais partir, elle m’a retiré les clefs pour ne plus pouvoir démarrer. Pour finir, nous nous sommes calmés, j’ai accepté de rester et nous sommes montés chez sa mère. La soirée était pesante.
Des histoires comme celle là, il y en a eu des dizaines. Tout sujet pouvait être bon pour amorcer une situation de crise. Dans tous les cas Charlotte avait ce qu’elle voulait : une dispute, des cris et de nombreuses heures perdues dans notre vie qui aurait dû être si belle.